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Les 100 premiers jours de Donald Trump : une présidence de rupture et de turbulences

Cent jours après son retour à la Maison Blanche, Donald Trump imprime une marque indélébile sur le paysage politique américain. Porté par la promesse d’une « action rapide et implacable », l’ancien président réélu n’a cessé, semaine après semaine, de bousculer l’ordre établi, de purger ses opposants et de redéfinir la fonction présidentielle selon une conception volontariste, voire autoritaire du pouvoir.

Une présidence de représailles

Dès son premier jour, Trump a concrétisé l’engagement de faire « payer » ceux qui l’avaient combattu. Les procureurs liés aux enquêtes judiciaires contre lui ont été congédiés. Les cabinets d’avocats les employant ont vu leurs accès aux bâtiments fédéraux suspendus et leurs contrats publics résiliés. Plus spectaculaire encore : la suspension des habilitations de sécurité d’une cinquantaine d’anciens responsables du renseignement, accusés d’avoir entaché la campagne de 2020 en liant l’affaire de l’ordinateur de Hunter Biden à une opération russe.

Les universités prestigieuses n’ont pas été épargnées. Columbia a perdu 400 millions de dollars de subventions pour sa gestion des manifestations pro-palestiniennes ; l’Université de Pennsylvanie a vu ses fonds gelés pour avoir soutenu une nageuse transgenre. Harvard, quant à elle, résiste aux pressions mais subit un gel de ses financements et une enquête sur son statut fiscal.

Un usage frénétique du décret présidentiel

À un rythme inédit, Trump a signé trois fois plus de décrets que Joe Biden sur la même période. Sur tous les fronts — économie, énergie, immigration, culture —, l’ancien magnat de l’immobilier agit par à-coups brutaux.

Il a proclamé une urgence nationale sur l’énergie, réimposé des tarifs douaniers massifs et suspendu les subventions fédérales à de nombreux projets environnementaux. En politique étrangère, il a sabré les aides internationales, conditionné le soutien à l’Ukraine à des pourparlers directs avec Moscou, et s’est attiré les critiques de nombreux alliés traditionnels.

Un tournant impérial de l’exécutif

Au cœur de cette frénésie se trouve une vision radicale : la suprématie absolue du pouvoir exécutif. Inspiré par le Project 2025 et soutenu par des think tanks conservateurs comme la Heritage Foundation, Trump affirme la prééminence du président sur le Congrès et les cours fédérales.

« Nous assistons à une tentative méthodique de refonder la relation entre les pouvoirs », analyse Lew Irwin, professeur de sciences politiques à l’université de Duquesne. Le limogeage de plusieurs inspecteurs généraux sans notification préalable au Congrès en est l’illustration la plus flagrante.

Une Amérique fracturée

Si Trump galvanise ses partisans — particulièrement dans les bastions industriels de Pennsylvanie —, il inquiète de plus en plus l’opinion publique. Son taux d’approbation plafonne à 42 %, en forte baisse depuis l’annonce de ses tarifs mondiaux, qui ont ébranlé les marchés financiers et alimenté l’inflation.

« Il a creusé des tranchées profondes dès son retour au pouvoir », observe Christopher Borick, politologue au Muhlenberg College. « Et son désaveu par une partie de l’électorat républicain pourrait compliquer les élections de mi-mandat. »

Des voix émergent même parmi ses soutiens initiaux, dénonçant l’extrémisme de certaines mesures : détentions massives de manifestants pro-palestiniens, gel brutal des fonds pour des programmes alimentaires ou éducatifs, attaques contre les minorités transgenres.

Vers une présidence sans frein ?

Alors que près de 200 procédures judiciaires contestent ses décisions, Trump ne faiblit pas. S’il parvient à imposer durablement cette concentration du pouvoir, les États-Unis pourraient voir ressurgir le spectre de ce que les constitutionnalistes redoutent : un « impérialisme présidentiel » institutionnalisé.

« En créant un exécutif surpuissant, les Républicains jouent avec le feu », prévient Borick. « Car le jour où un Démocrate hériterait d’un tel pouvoir, ils en subiraient eux aussi les conséquences. »

Pour l’heure, Donald Trump poursuit son œuvre de rupture, prêt à défier les contre-pouvoirs. Reste à savoir si l’Amérique saura, ou voudra, lui opposer une limite.

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