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La guerre commerciale frappe de plein fouet l’Amérique du Nord

L’économie canadienne est entrée en zone de turbulence. Selon plusieurs rapports économiques publiés ces derniers jours, le Canada est susceptible de subir une récession tandis que les États-Unis pourraient connaître un véritable effondrement économique, conséquence directe d’une guerre commerciale exacerbée par la politique commerciale de l’administration Trump.

Le dernier rapport de BMO Marchés des capitaux est sans appel : la combinaison de nouveaux droits de douane américains, de représailles canadiennes et d’une instabilité politique croissante pèsera lourdement sur la croissance économique des deux côtés de la frontière. Pour le Canada, le choc devrait se traduire par une contraction du PIB sur deux trimestres consécutifs en 2025, ramenant la croissance annuelle à un maigre 0,5 %. L’économie américaine, elle, verrait sa croissance tomber sous les 2 %, un seuil jamais franchi depuis cinq ans.

« L’économie canadienne subira des blessures graves, mais pas mortelles », tempèrent les économistes de BMO, tout en soulignant que la situation pourrait se détériorer rapidement si la guerre commerciale s’intensifiait, notamment dans les secteurs stratégiques de l’acier et de l’automobile. À terme, le rapport prévoit plus de 100 000 pertes nettes d’emplois au Canada, avec un taux de chômage atteignant 8 % d’ici la fin de l’année.

Les marchés financiers ne sont pas épargnés. La chute continue des places boursières américaines alimente l’effet de richesse inversé, réduisant la consommation des ménages, principal moteur de l’économie américaine. Cette spirale négative pourrait contraindre la Réserve fédérale (Fed) à abaisser ses taux d’intérêt de 125 points de base d’ici 2026, alors que la Banque du Canada envisage, pour sa part, une réduction de 75 points de base dès cette année.

La menace d’une récession continentale

Le Mouvement Desjardins rejoint l’analyse pessimiste de BMO : dans une note de recherche, ses économistes estiment que non seulement le Canada, mais aussi les États-Unis entreront en récession dès 2025. Ils pointent la convergence de plusieurs facteurs déstabilisateurs : politique protectionniste américaine, ralentissement de la croissance démographique au Canada, endettement élevé des ménages et effets secondaires du renouvellement massif de prêts hypothécaires à des taux plus élevés.

« Les tarifs douaniers de représailles aggraveront encore le ralentissement économique tout en poussant l’inflation à la hausse », avertissent les experts de Desjardins. Si la Banque du Canada ramènera probablement son taux directeur à 1,75 % d’ici la fin de l’année, la Fed pourrait être contrainte d’aller encore plus loin, au risque d’un affaiblissement prolongé du dollar américain.

Dans ce contexte d’incertitude extrême, les perspectives pour les marchés boursiers américains apparaissent sombres. Desjardins prévoit une sous-performance des actions américaines, au profit d’autres marchés mondiaux moins exposés aux tensions commerciales.

Une fragilité politique inquiétante

Derrière la volatilité économique, c’est la stabilité politique de l’Amérique du Nord qui est aussi en jeu. BMO alerte sur le fait que « la durée de vie des prévisions économiques se mesure désormais en jours, voire en heures », tant la politique commerciale de Washington semble imprévisible.

La menace d’utiliser la « force économique » comme instrument diplomatique plonge les entreprises canadiennes dans un état d’attente paralysante, dissuadant l’investissement, en particulier dans les secteurs les plus dépendants du commerce international. Les droits de douane spécifiques, notamment sur l’industrie automobile, pourraient provoquer des dégâts irréparables en cas d’escalade prolongée.

Dans cet environnement d’extrême fragilité, gouvernements et banques centrales naviguent à vue, cherchant un équilibre précaire entre soutien à la croissance et maîtrise de l’inflation. Mais à Ottawa comme à Washington, une chose est désormais certaine : l’Amérique du Nord est entrée dans une zone de tempête économique majeure.

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