Projet de loi 97 : les acériculteurs québécois craignent une réforme au service exclusif de l’industrie forestière
Le dépôt du projet de loi no 97, visant à moderniser le régime forestier du Québec, suscite une vive réaction des Producteurs et productrices acéricoles du Québec (PPAQ). Alors que le gouvernement vante une réforme attendue et ambitieuse, les acériculteurs redoutent un déséquilibre flagrant au profit de l’industrie forestière, et appellent à une équité réelle entre les différents usagers de la forêt publique.
« Il ne faut pas rater cette opportunité de moderniser notre approche forestière », insiste Luc Goulet, président des PPAQ, qui regroupe 13 500 producteurs et productrices. « Mais cela ne peut se faire au détriment de l’acériculture, un secteur clé de l’économie régionale et de l’identité québécoise. »
Un appel à l’équité dans l’accès à la forêt publique

Le projet de loi, porté par la ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina, entend revoir la gestion des terres du domaine de l’État. Les PPAQ y voient certes des avancées, notamment en ce qui concerne l’aménagement en forêt privée ou l’assouplissement de certaines procédures pour l’installation d’équipements. Mais ils demeurent inquiets face au risque de voir l’industrie forestière accaparer les nouvelles zones d’aménagement au détriment de la production de sirop d’érable.
Le président des PPAQ énumère trois conditions clés pour appuyer la réforme : l’intégration explicite de la production acéricole dans les zones d’aménagement prioritaires, une réelle concertation dans l’identification et la gestion des territoires concernés, et la reconnaissance de la compétence des acériculteurs pour planifier et exécuter les travaux en forêt publique.
Une contribution économique majeure à préserver
Alors que le Québec assure à lui seul plus de 70 % de la production mondiale de sirop d’érable, les enjeux dépassent la simple préservation d’un secteur traditionnel. « L’acériculture est un moteur économique régional, une filière d’exportation, un savoir-faire reconnu mondialement. Le gouvernement doit en tenir compte dans ses arbitrages », plaide M. Goulet, lui-même acériculteur dans la région de Bellechasse.
Les PPAQ rappellent que la forêt publique doit servir à générer des retombées durables — économiques, sociales et environnementales — pour l’ensemble des Québécois. Et selon eux, cela passe nécessairement par une politique qui valorise les érablières au même titre que l’exploitation du bois.
Vers une entente à court terme ?
Parallèlement à la démarche législative, un blitz de discussions a été engagé entre les PPAQ et le ministère afin de conclure une entente spécifique sur le développement de l’acériculture en forêt publique. Les représentants du secteur espèrent que ces négociations aboutiront rapidement, et préviennent : le dépôt du projet de loi ne saurait faire écran aux revendications maintes fois formulées.
« L’heure n’est plus aux déclarations d’intention, mais à l’action concrète et équilibrée », conclut M. Goulet. « L’avenir de l’acériculture québécoise en dépend. »

Pour mémoire : Le sirop d’érable du Québec est exporté dans plus de 70 pays, et constitue une marque emblématique de la province. Sa production, en grande partie tributaire des érablières situées en forêt publique, est un enjeu stratégique autant qu’identitaire.